Tout au sud de Kyushu, l’île de Yakushima abrite les plus hauts sommets de la région dans une immense zone couverte de forêt, allant de la jungle tropicale à la forêt subalpine typique des zones sub-arctiques. Au cœur de l’île se trouvent les yakusugi, des cèdres millénaires qui donnent un aspect féerique à cette nature préservée. Et le roi de cette forêt se nomme Jomon-sugi. Avec ses 2000 ans et plus, il serait le plus vieux cèdre du Japon et est sans contexte le plus impressionnant. Nombreux sont les Japonais qui lui rendent visite chaque année…
Il faut s’attendre à une très très longue marche, lorsqu’on s’engage sur le chemin menant au Jomon-sugi, l’un des plus vieux cèdres du Japon (la documentation locale le présente comme le plus vieil arbre du pays, ayant entre 2000 et 7000 ans, mais d’autres challengers existent dans l’archipel). L’ancêtre est en lui-même l’un des 100 paysages de l’ère Heisei et est situé dans une zone classée au Patrimoine mondial de l’Humanité et Parc naturel du Japon. Et il rejoint la catégorie des arbres millénaires qui nous ont enchantés, aux côtés du Jindaizakura, le plus vieux cerisier du Japon situé dans la préfecture de Yamanashi.
Le Jomon-sugi au cœur d’une île exceptionnelle
Vaste étendue de montagnes entre la Mer de Chine orientale et l’Océan Pacifique, avec 504 km², Yakushima abrite de nombreux sommets de plus de 1000 mètres et notamment les huit plus élevés du Kyushu, dont le plus haut est le mont Miyanoura qui culmine à 1936 mètres. Et avec sa nature particulière, l’île sauvage a été l’un des premiers sites naturels du Japon classés au Patrimoine mondial de l’Unesco en 1993.
Entre 8 et 10h (aller et retour) sont en général nécessaires pour cette journée de marche de 22 km à la rencontre du roi de cette forêt si unique et diverse. La randonnée qui débute à 600 mètres d’altitude, pour atteindre les 1300 mètres où est situé le Jomon-sugi, traverse deux types majeurs de paysages, un premier quasiment tout plat qui longe des rails désaffectés (qui servaient au transport du bois) et celui plus escarpé (des passages à escaliers facilitant la tâche) à travers la forêt aux arbres millénaires, dont une partie a inspiré Miyazaki et l’univers de ses films.
Si la première partie peut sembler un peu monotone (à part les deux ponts sans rambardes au début) – surtout au bout d’une heure et demie de marche sur un chemin similaire – la deuxième partie, qui est aussi la plus difficile, est bien plus intéressante et compense la première ! Le chemin, parfois en escaliers de bois et parfois en escaliers de racines, croise de nombreux yakusugi aux branches tortueuses et entourés de mousses vertes fabuleuses.
Les Yakusugi de Yakushima
Tout au long du chemin (qui commence avec les cèdres plus jeunes, les kosugi), des panneaux d’information permettent de découvrir l’histoire de ces cèdres, leur exploitation pendant l’ère Edo (1603-1868) puis le premier tiers du XXe siècle. Ainsi que l’arbre généalogique particulier des cèdres les plus faciles d’accès, à trois générations distinctes. Sur la souche d’un premier yakusugi abattu à l’ère Edo, un deuxième arbre s’est épanoui pendant 300-400 ans, avant d’être lui-même coupé au début du siècle dernier. Puis sur la souche dans la souche, un troisième cèdre se développe désormais.
Mais avant de s’aventurer pour ce chemin merveilleux, il faut bien savoir à quoi s’attendre et y être préparé. Ce qui rend Yakushima si spéciale, à part sa distribution végétale originale combinant à la fois le climat d’Okinawa et celui de Hokkaido, selon l’altitude, est sa très forte pluviométrie. Le taux de pluie annuel est ainsi le double de celui du Japon “continental” avec 4500 millimètres sur le littoral et jusqu’à 10 000 dans les montagnes !
L’automne au Jomon-sugi
En termes de saison, l’automne est la plus adaptée pour la randonnée avec ses relativement faibles précipitations, un ciel qui peut être plus dégagé, des températures fraîches mais pas encore trop froides et évidemment pour les couleurs des feuilles. Cette saison est aussi un peu moins fréquentée qu’au moment de la Golden Week où il faut s’attendre à marcher à la queue-leu-leu pendant une bonne partie du chemin) ou durant l’été. Mais dans tous les cas, et quelque soit le temps, il faut savoir que le terrain reste très humide (et glissant) plus on s’enfonce dans la forêt et donc plus on s’approche du Jomon-sugi. Et à partir de décembre, avec la neige qui couvre rapidement les sommets, certains chemins de randonnée deviennent quasiment inaccessibles, sauf aux randonneurs plus chevronnés.
L’arrivée au Jomon-sugi
Le plus vieil arbre de Yakushima, le Jomon-sugi est évidemment le point d’orgue de cette longue randonnée. Le doyen de la forêt apparaît finalement à une cinquantaine de mètres, un peu en hauteur et à admirer depuis deux pontons, constructions érigées pour le protéger. Il ne faut pas s’attendre à un arbre à première vue plus extraordinaire que ceux déjà observés sur le chemin : la distance, la végétation dense et la brume brouillent franchement son observation.
Si la découverte du Jomon-sugi peut en rendre certains sceptiques après une si longue marche, l’arbre est réellement un monument naturel fascinant devant lequel il faut s’arrêter de longues minutes pour essayer de capter un peu de son histoire et de son aura, avant de reprendre la route à travers la forêt magique et source d’enchantements. Une virée qui mérite amplement les nombreuses heures de marche !
Quelques conseils avant la marche
Avec une marche si longue, un équipement adapté est évidemment conseillé et notamment pour faire face au froid humide des profondeurs de la forêt ! Près du port de Anbo, du matériel de randonnée se trouve facilement en location : chaussures, sac et veste imperméable (la réservation est conseillée en haute saison, mais pas obligatoire, par exemple à Mori-no-kirameki).
Étant donné la longueur du chemin qui mène au Jomon-sugi, soit 22 kilomètres en tout, une bonne maîtrise des horaires est évidemment conseillée. Il est important de commencer le chemin officiel Ohokabu Hodo (à 1h40 de la passe Arakawa Tozanguchi, où le bus dépose les randonneurs) bien avant 10 h pour pouvoir la terminer dans la journée (l’heure recommandée de départ est 5 – 7 h du matin et l’heure maximale pour quitter le Jomon-sugi est 13 h – voir le comment s’y rendre plus bas pour les horaires des bus).
Pour ceux qui aimeraient combiner le passage au Jomon-sugi et l’ascension du mont Miyanoura, il est conseillé de passer la nuit en hutte (les deux randonnées peuvent se faire distinctement aussi) ! Six huttes sont disponibles sur l’île avec une capacité de 20 à 60 personnes. Le camping sauvage est uniquement autorisé lorsque les huttes sont pleines (la tente doit être plantée non loin de la hutte). Aucune réservation n’est possible, la règle est celle du premier arrivé, premier servi.
Notre découverte de Yakushima
Pour notre part nous avons réalisé la randonnée fin novembre, en 9 heures de marche, en prenant le bus de 4h23 à Anbo puis celui de 5h20 au musée, pour un retour avec le bus de 16h, sans pluie et avec des températures entre 12 degrés au niveau du départ et 6°C à l’altitude du Jomon-sugi. Une vraie randonnée, même si sans réelle difficulté d’ascension, qui permet de travailler son endurance.
Comment s’y rendre ?
L’île de Yakushima est accessible en avion depuis Kagoshima (l’aéroport est situé à près d’une heure en bus du centre ville), Fukuoka et même Osaka.
Sinon la meilleure option reste le bateau. Les deux ports de l’île sont Miyanoura et Anbo.
Depuis Kagoshima (différents terminaux en fonction du bateau choisi), le trajet peut s’effectuer en ferry rapide, avec le jetfoil, pour un trajet de 2h ou 3h coûtant 8300 yen aller simple ou 15000 yen AR. Une autre option, plus économique, est le relativement plus lent ferry Yakushima 2, au prix de 4900 yen aller simple ou 8900 AR (temps de trajet : 4h à 4,5h, véhicules OK). Existe enfin le ferry de fret Hibiscus, qui réalise le trajet de nuit en 13 heures, avec une longue pause nocturne à Tanegashima (descente interdite), pour 7200 yen AR.
Attention cependant, seul le jetfoil dessert directement le port d’Anbo, d’où il est plus pratique de partir pour la randonnée jusqu’au Jomon-sugi. En séjournant ailleurs, comme dans le port de Miyanoura, il faudra également prendre en compte le réseau plutôt complexe de bus locaux de l’île. Un autre sentier de randonnée existe aussi pour rejoindre le Jomon Sugi depuis le nord de l’île, mais il est plus complexe et encore plus long.
À noter aussi qu’au niveau du port d’Anbo, l’office de tourisme se trouve dans le grand supermarché du port (qui reste aussi la meilleure option pour faire ses courses dans le secteur).
Enfin le site Yes! Yakushima est très pratique pour consulter les différentes options et horaires pour se rendre à Yakushima, ainsi que pour vérifier les possibilités de trajets en bus et préparer sa randonnée.